Tout au long de l’été, divers articles ont alerté sur l’importance et l’ampleur de la crise du logement en France.
C’est ainsi que Le Monde a mis le logement à sa Une, trois fois ces derniers jours :
- « Crise du logement ; un marché de la location durablement grippé », Le Monde du 30 août.
- « Logement : une crise prévisible », Le Monde du 7 septembre.
- « La crise du logement est violente », Le Monde du 7 septembre.
- Et se reporter également à l’article du 10 mai dernier : « Logement: aux racines d’une crise que le gouvernement tarde à affronter ».
Une crise annoncée
« La crise violente, était écrite », constate Véronique Bédague, PDG de Nexity (Le Monde du 7 septembre), et face à cela l’indifférence de l’exécutif :
« L’histoire était écrite, elle a lieu. C’est la chronique d’une crise annoncée et elle est violente. Les chiffres sont encore pires que ce que l’on pouvait imaginer : – 45% en un an pour les réservations de logements neufs… Il fallait traiter la crise quand elle était en train de se nouer, et non pas attendre qu’elle soit installée, parce que cela va coûter beaucoup plus cher ».
Une analyse partagée
L’entretien qu’elle a donné au Monde s’appuie évidement sur son expérience professionnelle mais aussi sur les travaux du Conseil national de la refondation Logement qu’elle a co-présidé avec Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre.
Les expertises rassemblées au sein du CNR Logement permettent d’avoir une analyse partagée, (consensuelle ?) de la crise du logement de ses manifestations, de ses causes :
- C’est une crise systémique: tous les segments du marché du logement sont touchés : le neuf avec la restriction des crédits immobiliers qui met de l’huile dans les rouages et permet le mouvement (suppression du PTZ (prêt à taux zéro) sauf dans les zones tendues où le logement est très cher et inaccessible, suppression du dispositif Pinel…), moins de mouvement aussi dans l’ancien avec la hausse des taux ; et en bout de chaine le logement social est touché par la chute de la construction neuve (moins d’achats en vente en état futur d’achèvement par les organismes HLM , donc moins de logements sociaux neufs).
- C’est une crise de la mobilité. Les possibilités de mobilité vont se réduire sur toute la chaine du logement : passage du locatif à l’accession, entrée sur le marché locatif privé, réduction du nombre d’attributions de logements sociaux, blocage dans le très social.
- Au total ceux qui ont les moyens se logeront en consacrant une part toujours plus importante de leurs revenus au logement. Les nouveaux entrants ne peuvent plus acheter et ont du mal à trouver une location (cas des étudiants en cette période).
- Selon Véronique Bédague, l’inaction gouvernementale peut s’expliquer par les raisons suivantes : « il y a dans la sphère publique l’idée qu’en réalité nous n’avons plus besoin de logements compte tenu des projections démographiques, du nombre de logements vacants et des résidences secondaires. Il y a un différend sur le diagnostic. Par ailleurs, l’État considère le logement comme un gisement d’économies. En réalité la fiscalité du logement rapporte beaucoup à l’État ».
Un gouvernement muet, jusqu’à ces derniers jours
Emmanuel Macron a annoncé récemment un projet de loi sur le logement sur la base des conclusions du Conseil national de la refondation Logement largement ignorées jusqu’à maintenant.
Quelques alertes récentes concernant le logement :
- la violence des expulsions locatives : initiatives de quelques préfets, le vide juridique en matière d’expulsion des étudiants logés en cité universitaire (exclus des protections accordées aux locataires) ;
- l’arrêté qui permet de qualifier des logements avec 1,80 mètre sous-plafond ;
- 12% des étudiants renoncent à une formation parce qu’ils ne trouvent pas de logement ;
- 2 000 enfants à la rue à la fin du mois d’août en France ;
- la crise qui s’annonce également en matière d’emploi dans le bâtiment : « Alors que le marché du neuf est en chute libre, promoteurs, constructeurs et artisans appellent l’État à réagir », Le Monde du 15 septembre
Un rappel utile :
- « L’effort public pour le logement n’a jamais été aussi bas : il est passé de 2,2 % du PIB en 2010 à 1,5 % en 2021 » : Christophe Robert lors de la présentation du Rapport du mal-logement de la Fondation Abbé Pierre en février dernier ;
- Depuis le premier mandat d’Emmanuel Macron, le budget logement a diminué de 4,6 milliards d’euros,
- Le logement contribue à hauteur de 88,3 milliards € aux recettes fiscales (hors taxe d’habitation et impôt sur la fortune immobilière) de loin supérieures aux dépenses qui s’élèvent à 38,2 milliards d’euros.
Cherchez l’erreur !
Sesame, un nouveau partenariat avec Un Toit Pour Tous
C’est quoi Sesame ? Sesame est un collectif d’entreprises engagées auprès d’associations dédiées aux plus vulnérables. Plus précisément son action a pour but de créer un lien de solidarité territoriale entre des entreprises, de toutes tailles et tous secteurs d’activité, installées sur le territoire de la région urbaine (Grésivaudan, Métropole grenobloise et Pays voironnais) et des […]
En réunissant le 14 juin dernier, en présentiel plus de 50 personnes, sur le thème des expulsions locatives en partenariat avec la Fondation Abbé Pierre, les « Rencontres d’Un Toit pour Tous » confirment leur vitalité et l’intérêt des thèmes abordés.
« Éviter aux personnes de se retrouver à la rue est un enjeu de taille ». C’est ce que rappelle en introduction Véronique Gilet, déléguée de la Fondation Abbé Pierre Région Auvergne Rhône-Alpes, en pointant trois constats alarmants :
- être expulsé de son logement constitue une vraie rupture dans une trajectoire de vie, rupture dont les effets sont multiples et durables ;
- on constate, chiffres à l’appui, de plus en plus d’expulsions sans relogement, y compris pour des familles avec des enfants en bas âge. Effet de « rattrapage » après le ralentissement des expulsions pendant la période Covid devant lequel il faut rester en alerte ;
- enfin, la prévention des impayés et des expulsions semble aujourd’hui un peu moins mobiliser les acteurs. Les retours se font le plus souvent sous forme de réponses qui restent expérimentales, donc incertaines, durant des années. On peut s’inquiéter d’une disjonction croissante entre les ménages et les dispositifs existants.
Les points névralgiques de la prévention des expulsions en Isère
L’Observatoire de l’hébergement et du logement (OHL) qui a étudié la situation actuelle (lire la synthèse ici) en relève plusieurs :
– le peu de place faite aux ménages pour exprimer leur point de vue alors qu’ils sont fortement appelés à se mobiliser. Mais les impliquer demande des pratiques et des moyens d’intervention spécifiques. De plus il y a inégalité entre les locataires du secteur social, plus regroupés, et ceux du secteur privé ; la situation de ces derniers est, du reste, plus difficile à identifier et souvent plus dégradée.
– des dispositifs très nombreux, enchevêtrés, mais surtout souvent expérimentaux et différents selon les territoires entrainant inégalité et illisibilité pour les ménages.
– des acteurs de cultures professionnelles très différentes dont la coordination est fondamentale. Or leurs relations reposent plus sur les relations inter-personnelles qu’inter-institutionnelles.
– le point crucial du relogement quand l’expulsion va à son terme. La coordination des acteurs est là aussi déterminante. Les personnes sont souvent obligées de trouver des solutions par elles-mêmes ; si cela révèle des solidarités encore vivaces, on peut s’interroger sur la nature et la qualité de ces solutions personnelles imposées par les circonstances.
– les évolutions législatives contenues dans la loi Kasbarian sont source d’inquiétudes pour les professionnels dans un cadre d’action déjà difficile.
Des réponses encourageantes de trois des nombreux acteurs qui se mobilisent en Isère
– à l’Union départementale des associations familiales l’accent est mis sur l’« aller vers »(1). Intervenir le plus en amont possible afin d’éviter la dégradation des situations est gage de réussite. En général, les ménages sont soulagés et reconnaissants de cette « perche tendue », surtout quand le lien est difficile ou rompu avec leur bailleur. Le même accompagnant assure le soutien tout au long de la démarche et le dispositif de conciliation aboutit souvent à un accord amiable, évitant la procédure d’expulsion.
– le bailleur social PLURALIS a un « Service solidarité et contentieux » (binôme travailleur social / gestionnaire) qui intervient dès la première lettre pour impayé. De multiples réponses sont mobilisées : rendez-vous tripartite, conciliation, commissions avec le locataire, mutations.
– le service départemental (co-porté avec l’État) du PAHLDI (2) a mis en place une commission pour coordonner et évaluer les actions engagées par les différents acteurs de manière à forger une culture commune et à former et informer les intervenants (la CCAPEX) (3).
Associer les locataires à la réflexion et développer une démarche adaptée pour aller vers les locataires et les propriétaires du parc privé sont au cœur des préoccupations du PAHLDI.
La charte de prévention des expulsions donne un cadre collectif à l’engagement de tous pour intervenir le plus précocement possible, avant la résiliation du bail, en favorisant les mutations intra et inter-bailleurs et en soutenant les actions pro-actives d’ »aller-vers ».
De nombreuses interventions des participants
Pour confirmer les constats énoncés précédemment et évoquer les composantes structurelles à la racine des risques d’expulsion (prix excessif du logement et de ses charges, « grippage » de la chaîne hébergement – logement par absence de solutions de sortie etc.)
Des pistes de réflexion et des attentes :
– soutenir les associations au plus près des ménages ;
– renforcer encore la place des ménages dans la procédure, même si l’Isère est plutôt en avance dans ce domaine ;
– étudier les trajectoires des ménages expulsés, pour mesurer les effets de l’expulsion et identifier les solutions qu’ils ont mobilisées ;
– favoriser les mutations inter-bailleurs, fondamentales pour éviter les impayés ;
– réfléchir au partage du risque financier de dispositifs sous-utilisés, comme le bail glissant ;
– utiliser les indemnisations de l’État (quand il n’y a pas de recours à la force publique) au relogement des ménages ;
– généraliser les arrêtés municipaux de non mise à la rue, comme à Grenoble.
Les participants ont convergé sur la nécessité de travailler ensemble sur ce diagnostic pour élaborer collectivement les réponses et les fonctionnements les plus pertinents.
Notes :
(1) » Se mettre à l’écoute et à niveau des ménages et des problèmes qu’ils expriment, pour se comprendre, sans juger ».
(2) Plan d’action pour l’hébergement et le logement des personnes défavorisées en Isère
(3) Commission spécialisée de coordination des actions de prévention des expulsions locatives
Point presse septembre 2023
Cécile Legendre est secrétaire d’Un Toit Pour Tous, membre du bureau et administratrice. Elle est également référente du groupe DALO depuis plus de 6 ans.
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Point presse juillet/août 2023
Point presse : s’informer pour agir en toute connaissance de cause. Le comité de rédaction du site web d’Un Toit Pour Tous sélectionne dans des quotidiens (surtout « Le Monde », « La Croix », « Le Dauphiné Libéré ») et dans des hebdomadaires et mensuels les articles couvrant les thèmes d’intervention de l’association.
Dans le cadre de leurs missions d’action sociale en vue de l’insertion par le logement, les travailleurs sociaux d’Un Toit Pour Tous sont amenés à accompagner de plus en plus de personnes rencontrant des problèmes de santé d’ordre psychique ayant des conséquences sur leur quotidien.