L’Observatoire de l’hébergement et du logement d’Un Toit Pour Tous (OHL) a publié en septembre 2022 une étude ainsi qu’une synthèse sur l’accès au logement des jeunes sans domicile autonome et sans ressources. Initié par la Mutualité française de l’Isère, ce travail a été soutenu par plusieurs institutions locales, qui s’interrogent sur la pertinence et l’impact des réponses existantes.
L’analyse repose sur des connaissances inédites, issues d’entretiens qualitatifs approfondis avec des jeunes vivant en grande ville comme en ville moyenne. Ces jeunes sont essentiellement hébergés temporairement en foyer ou chez des tiers.
Le chômage et la prépondérance d’emplois précaires, l’absence de prestations sociales stables, la faiblesse des soutiens familiaux possibles, les conduisent à des situations de pauvreté et de précarité qui rendent impossible l’accès à un logement autonome.
En France, les politiques sociales sont très orientées vers la famille et moins vers l’individu
Ainsi, lorsque la solidarité familiale est incertaine ou impossible, la solidarité publique ne prend que très partiellement le relai pour cette classe d’âge. Les dispositifs prévus ne sont pas simples d’accès, toujours à durée limitée et ne concernent au final que peu de jeunes. L’étude montre ainsi que l’accès à un travailleur social n’est pas évident même quand les jeunes en connaissent les chemins. Ce peut être par méconnaissance mais aussi par défiance envers les institutions et leurs procédures contraignantes. Les entretiens montrent que la difficulté réside aussi dans la faiblesse des liens entre les acteurs du secteur logement / hébergement et ceux de l’accompagnement social et insertion professionnelle. Cette organisation pénalise les jeunes, pour qui l’articulation logement / emploi est au cœur même de leur précarité.
L’articulation logement / emploi : l’absence de l’un engendre l’absence de l’autre
Dans les parcours étudiés, on voit que des emplois sont abandonnés faute de logement adapté et que les types d’emploi obtenus rendent quasi impossible l’accès à un logement. L’étude montre clairement que, pour ces jeunes, le besoin d’être logé est premier dans le processus d’insertion. En effet, pour y répondre le jeune accepte des emplois « alimentaires » qui mettent au second plan une insertion professionnelle de qualité. Ainsi, le logement s’avère être un réel levier d’accès à l’emploi, alors que les dispositifs mettent l’emploi en premier.
Des solutions de logement existantes en décalage
En effet, ces solutions sont en décalage avec les besoins et les attentes de ces jeunes. Le recours au parc social est barré à des situations aussi instables. Les structures d’hébergement collectif sont perçues comme inadaptées à leurs attentes et les solidarités amicales sont trop incertaines. Le secteur privé est la seule solution rapide et souple, mais trop couteux pour beaucoup. Le modèle du foyer jeune travailleur, couplant autonomie et accompagnement, est perçu comme une solution efficace par ceux qui ont pu l’expérimenter. Mais y accueillir les plus précaires nécessiterait un renforcement des moyens en nombre de places et en moyens d’accompagnement.
Les enseignements de cette étude obligent à reconnaitre le rôle central du logement dans le processus d’insertion des jeunes les plus précaires. Ils indiquent aussi la nature des réponses à mettre en œuvre : souples et surtout réactives, tout en s’inscrivant dans la durée nécessaire à chacun pour une insertion de qualité. Enfin, ils montrent la nécessité de (re)travailler l’organisation des réponses institutionnelles pour assurer une meilleure articulation entre acteurs de l’insertion et du logement, afin de mieux adapter les réponses existantes aux besoins et de créer de nouvelles réponses, pour combler les manques constatés.
Lire l’étude
Lire la synthèse